La programmation d'un festival de jazz en France de nos jours est à l'image de la société et des nouvelles lectures des artistes. La version 2023 de "Jazz à La Villette" (Paris - du 30 août au 10 septembre) n'échappe pas à cette règle de la diversité musicale. Si l'on excepte les musiques du monde et celles qui, dites "cousines", envahissent depuis plus de trois décennies les festivals de jazz sous prétexte de remplir les jauges et d'attirer du public, le jazz a encore toute sa place.
Jazz intergénérationnel
A 78 ans, Henri Texier est largement le doyen de la programmation (5 sept. - Cité de la Musique). Sur les épaules du vénérable contrebassiste/compositeur, qui se présentera à la tête de son "Indian Septet" (comprenant notamment son fils, Sébastien, saxophone), reposent près de six décennies du jazz français, européen et surtout librement improvisé.
A l'opposé de cette légende du jazz hexagonal, deux figures de la nouvelle génération du jazz "made in USA" : Lakecia Benjamin et Theo Crocker (3 septembre - Cité de la Musique)
La première, altiste/compositrice, après avoir rendu un hommage très appuyé à la musique mystique du couple John & Alice Coltrane, a commis un album, "Phoenix", militant féministe et engagé, avec comme invitées Angela Davis, égérie des Black Panthers, et la chanteuse Dianne Reeves.
Le second, à la trompette, s'il est le petit-fils du trompettiste classique Doc Cheatham, a cependant été élevé au biberon du jazz fusion, du hip-hop, du blues, du R&B, voire du rock et de la pop. Autant d'influences qui transpirent dans sa musique, parfaitement dans l'air/ère du temps/tempo.
Pêle-mêle d'autres têtes d'affiche
Multi récompensée (Grammy Awards & Académie du Jazz), la vocaliste Samara Joy (Grande Halle - 10 sept.) est incontestablement la nouvelle sensation vocale. A 23 ans, la jeune femme, originaire du Bronx à New York, s'est déjà hissée au niveau des plus grandes grâce à une voix et un style imprégnés par la tradition de glorieuses aînées, voire de contemporaines.
Figure emblématique de la scène jazz de Manchester et britannique, GoGo Penguin - Chris Illingworth (piano), Nick Blacka (contrebasse) (Grande Halle - 9 sept) - est de retour, après avoir connu quelques vicissitudes, sous l'impulsion d'un nouveau batteur, Jon Scott. Ce changement de rythmicien n'a en rien affecté leur style aux motifs répétitifs et aux mélodies parfois éthérées.
Sixun (Grande Halle - 8 sept) qui fut et reste le seul, unique et authentique groupe français ayant Weather Report pour référence, a créé son ADN dans le jazz-rock et jazz fusion. Près de 40 ans après son apparition, les membres fondateurs ont décidé de remettre aux goûts du jour cette forme de jazz électrique et binaire qui a fait leur réputation.