Magnétisme personnel, technique et virtuosité exceptionnelles, créativité et inventivité, sens de la transmission du savoir et de la connaissance, héritier des plus grands violonistes de jazz : telles sont quelques une des spécificités qui s'appliquent et qui caractérisent Didier Lockwood, qui nous a quitté dimanche à l'âge de 62 ans, des suites d'une crise cardiaque.
Dire que le monde du jazz - français, européen et international - est sous le choc est un euphémisme.
En plus de quatre décennies de carrière, le talentueux instrumentiste originaire de Calais et fils d'un professeur de violon, d'abord membre du groupe rock kobaien "Magma" du batteur Christian Vander, puis de "Zao", une formation de jazz-rock et de rock progressif emmenée par François "Faton" Cahen et Yoshk'o Seffer dans les années 1970, s'est imposé au firmament du jazz tout en diversifiant - un peu à la manière de Michel Portal - ses activités musicales.
Compositeur de musiques de films, d'opéra jazz, de musique symphonique, avec notamment son concerto "Les Mouettes", de poèmes et de spectacles lyriques - comme "Le Jazz et la Diva" avec Caroline Casadesus -, le violoniste - acoustique et électrique, dépositaire du violon de Michel Warlop que lui avait confié son mentor et maître à penser, Stéphane Grappelli - prolongeait sa passion musicale à travers l'enseignement, grâce à son école, le CMDL (Centre des musiques Didier Lockwood, à Dammarie-les-Lys en Seine-et-Marne).
La force de ce grand musicien, particulièrement affable et attachant, était aussi sa faculté de visionnaire capable de brasser les musiques. Ici le jazz français avec ses déclinaisons, pour certaines manouches, ici encore le jazz-rock et la fusion, là, la musique classique ou des expérimentations sonores très avant-gardistes. Et tout cela avec un immense professionnalisme et une passion dévorante pour l'exploration, la recherche et l'envie de dépasser le simple formatage.
Violoniste extrêmement sensible, généreux, fidèle en amitié, séducteur et enchanteur en musique, il s'était produit il y a quelques semaines à peine au Duc des Lombards à Paris - avec André Cecarrelli (batterie) et Antonio Farao (piano) pour la présentation de son dernier opus, "Open Doors" (Okeh/Sony Music) - et venait de terminer une soirée au Bal Blomet (Paris - XVè) quand la grande faucheuse, sans prévenir, à enlever au monde du jazz l'un de ses plus beaux et attachants fleurons.