L’atmosphère musicale de New York City est vivifiante. Surtout en matière de jazz. Une bouffée d’air pleine de swing très appréciée et qui sied à Jérôme Sabbagh.
Exilé aux Etats-Unis depuis près de trente ans, le saxophoniste-ténor et compositeur français désormais quinquagénaire, qui a notamment croisé la route du légendaire pianiste Kenny Barron, a fait le choix, pour son nouvel album « Heart » (Analog Tone Factory), d’une autre personnalité éminente du jazz contemporain – l’iconique batteur vétéran Al Foster (81 ans – membre des formations de Miles Davis durant treize ans entre 1972 et 1985), sans oublier le troisième homme, le contrebassiste Joe Martin - et de l’architecture des titres proposés.
Un trio (sans piano) qui tire la quintessence de son approche musicale et instrumentale dans celle d’éminents aînés dans le passé comme Sonny Rollins surtout, voire John Coltrane et Archie Shepp.
Le choix du répertoire de cet album – huit morceaux dont cinq standards, plus deux compositions collectives et une du leader, le titre même de l’album – est aussi le reflet d’un jazz « born in the USA » qui ne renie pas ses racines et y trouve, au contraire, une source d’inspiration et d’évolution.
« Prelude To A Kiss » (Duke Ellington), “E.S.P” (Wayne Shorter), “Gone With The Wind”, “When The Light Are Low” (Benny Carter), sans oublier l’impérissable et tellement magnifié “Body And Soul”, sont autant de relectures originales qui offrent au trio toutes les opportunités harmoniques, rythmiques et mélodiques de développer un style propre, à la fois puissant et optimal. Le tout transcendé réellement par trois maîtres virtuoses.
A cela viennent s’ajouter des compositions originales, émancipatrices et ambitieuses, dont « Heart » en est le cœur essentiel.
A une époque où l’individualité voire l’extravagance permettent un vague consensus plutôt qu’une réelle reconnaissance des talents et de l’essence même du jazz, Jérôme Sabbagh et ses brillants acolytes incarnent ce jazz immortel et historique dans son héritage musical.
- Il sera le 9 octobre au Sunside à Paris en quartet avec Ben Monder (guitare), Matteo Bortone (contrebasse) et Fred Pasqua (batterie).
- Le 10 octobre toujours au Sunside en trio avec Ben Monder & Daniel Humair (batterie)
- (Les photos sont de Shervin Lainez)
Didier PENNEQUIN